Jean Van Lierde (1926-2006)
Naissance à Charleroi (Belgique) le 15 février 1926 d'une
mère wallonne et d'un père flamand, dans une famille catholique
modeste. Par obligation matérielle, son père le fait engager dans
l'usine où il travaille dès l'âge de 15 ans, en 1941.
Il en gardera un sentiment d'injustice et une frustration de n'avoir pas pu
continuer ses études, qu'il compensera par une boulimie littéraire.
En 1942, sur son lieu de travail, il fait partie d'un réseau de
résistance. A la Libération, en septembre 1944, Van Lierde
participe à l'arrestation de collaborateurs, refusant d'être armé
et écuré par la façon dont les vaincus sont traités.
A cette époque, il est profondément immergé dans le monde
catholique (paroisse, scoutisme, mouvance démocrate-chrétienne)
mais, parcourant réunions et meetings, noue également de nombreux
contacts avec les milieux de gauche et libertaires. En 1949, il refuse
de faire son service militaire et est emprisonné. A sa sortie, on lui
interdit de fréquenter sa paroisse et il est démis de ses fonctions
chez les scouts. Entre 1949 et 1952, il effectue trois séjours
en prison, totalisant quinze mois derrière les barreaux. En 1952,
les autorités militaires lui accordent de remplacer son service par un
travail à la mine (sorte de « condamnation aux travaux forcés »),
espérant ainsi se débarrasser d'un énergumène récalcitrant.
Il y découvre « l'enfer de la mine » et en profite
pour dénoncer les effroyables conditions de travail et l'exploitation
impitoyable des mineurs, pour la plupart étrangers et non syndiqués.
Cela lui vaut d'être renvoyé après six mois d'activité
et mis à l'index de tous les charbonnages belges. Jean Van Lierde
poursuivra son combat contre le service militaire jusqu'à l'adoption
de la loi sur l'objection de conscience et le service civil en 1964. Durant
les années 60-70, il participe également à l'organisation
de nombreuses manifestations pacifistes et antimilitaristes, à la création
de réseaux pour l'accueil de déserteurs américains de la
guerre du Vietnam, s'appuyant sur l'expérience acquise au sein d'un réseau
d'aide au FLN et aux appelés français réfractaires durant
la guerre d'Algérie. La lutte anticolonialiste est en effet un des autres
piliers de son action. Il souhaite participer à la préparation
d'une indépendance dans les moins mauvaises conditions possibles, en
transmettant l'héritage de la non-violence dans les luttes de libération
et en favorisant le dépassement des clivages ethniques. C'est un proche
de Patrice Lumumba, premier ministre congolais assassiné le 17 janvier
1961 au Katanga. Après une enquête minutieuse, Van Lierde
publie avec le Centre de recherche et d'information sociopolitiques (CRISP),
qu'il a fondé en 1958 avec Jules-Gérard Libois et dont il
fut le secrétaire général pendant vingt-cinq ans, le récit
des « cinquante derniers jours de sa vie », établissant
ainsi les diverses responsabilités. Il se définissait comme un
« militant chrétien aux idées
socialistes et libertaires » et s'éteindra le 15 décembre
2006 à Bruxelles.
(D'après Xavier Bekaert, dans « Alternatives
non violentes » n° 117.)