Juillet-août 2012

PUBLICATIONS

Tenter de réconcilier christianisme et anarchisme n'est pas chose facile. C'est pourtant à cette tâche que se sont attelés Jacques de Guillebon et Falk van Gaver avec L'Anarchisme chrétien (L'Œuvre éditions, 416 p., 29 euros). Malgré le fameux Ni Dieu ni maître, sur le seul plan moral et individuel, anarchistes et chrétiens partagent ou devraient partager le respect de l'être humain, la révolte devant l'injustice, l'oppression, le mensonge, la tyranie, la corruption et la violence, le désir de se perfectionner et la soif de connaissance… Autant les auteurs sont convaincants avec Proudhon, Tolstoï, Gandhi (« Christ hindou »), Thoreau, Ellul, autant on demeure dubitatif en ce qui concerne François d'Assise, Benoît-Joseph Labre, Barbey d'Aurevilly, Claudel, Bernanos, Chesterton, etc. Sans parler d'un Retté, anarchiste de lettres puis, ayant renié ses convictions précédentes, fou de Dieu ! Un « clochard céleste » ou un « divin dandy » ne constitue pas forcément un anarchiste. Quant à Péguy et à Simone Weil, ne s'agit-il pas plus d'une proximité de lutte que d'une adhésion aux idées libertaires ? En quête d'absolu et négateurs de toute autorité (extérieure), nombre de chrétiens cités revendiquent non pas la suppression de l'Etat mais un Etat minimum… à l'instar, pourrions-nous dire, des libertariens et autres néolibéraux. Peut-on leur suggérer de se libérer aussi de l'Eglise, institution criminelle et liberticide s'il en est ? Reste un ouvrage foisonnant, bien souvent passionnant, qui est le premier à explorer ce thème. La tendance insurrectionniste a fait des apparitions fréquentes et diverses dans l'histoire de l'anarchisme. Elle semble depuis quelques années renaître, alors que la période paraît sans perspectives de changement en profondeur et privée de sujet révolutionnaire, avec des écrits (L'Insurrection qui vient), des pratiques (luttes anti-G8 ou dans le Val de Suze) « et même des mises en scène politico-médiatiques comme celle menée contre les “sept de Tarnac” ». Avec La Tentation insurrectionniste (Acratie, 106 p., 10 euros), J. Wajnsztejn et C. Gzavier s'attachent à remonter aux prémisses de cette résurgence dans les années 1970 et analysent les positions théoriques et les actions d'un certain nombre de groupes et revues (Les Fossoyeurs du vieux monde, Os Gangaceiros, La Bibliothèque des émeutes, Tiqqun, L'Appel). Puis ils dégagent les limites théoriques, pratiques et organisationnelles de l'insurrectionnalisme ; lui reprochant une analyse insuffisante des transformations de l'Etat, de négliger les mécanismes de domination par consentement, de privilégier le « spectacle de l'affrontement » et le culte de l'émeute ou de la violence, soulignant les risques avant-gardistes ou de professionnalisation de la lutte armée… Etude très argumentée de ce phénomème, le livre nous renvoie aussi à notre propre incapacité et à l'interrogation de base : que faire ? Les Editions CNT-RP nous offrent avec Cuba : révolution dans la révolution. Expériences libératrices et créatrices (328 p., 18 euros), de Miguel Chueca, Karel Negrete et Daniel Pinós, un recueil de textes « relatifs à la situation passée, présente et future de la grande île des Caraïbes » afin de « mieux faire connaître (…) les divers protagonistes du mouvement contestataire cubain ». Pendant trop longtemps, les anarchistes de langue française ont semblé se désintéresser de la situation dans ce pays, pris entre les feux de la propagande anti et pro-Castro. En 2004, les mêmes éditions ont publié L'Anarchisme à Cuba de Frank Fernández (lire recension), suivi de « Témoignages sur la révolution cubaine » d'Augustin Souchy, puis des sites comme Polémica cubana (en français) ou le Groupe d'appui aux libertaires et aux syndicalistes indépendants de Cuba (Galsic) ont tenté de renouer les fils. Ce qui permet d'assister – et sans doute d'aider – à la renaissance de l'anarchisme dans ce pays tenté, après l'échec du socialisme d'Etat et la mise à l'écart de son leader historique, de rétablir progressivement le capitalisme privé afin de perpétuer la domination de la classe dirigeante. Les textes présentés abordent aussi bien les questions politiques que des sujets sociétaux tels que le racisme, l'homosexualité, la liberté d'expression, l'environnement…, ou d'ordre culturel. La plupart d'entre eux ont été élaborés par des militants de diverses tendances adhérant à l'Observatoire critique de la révolution cubaine qui prône un socialisme démocratique et participatif. Il aura fallu près de quarante ans pour que la version française des Mémoires de Cipriano Mera voient le jour. La traduction, la réécriture, la frappe, le montage et la correction ont été réalisés par le groupe Sacco et Vanzetti (Fédération anarchiste), mais les aléas de la vie militante, la lassitude et le vieillissement des militants ont fait que c'est grâce au dynamisme des éditions Le Coquelicot que Guerre, exil et prison d'un anarcho-syndicaliste (préfaces de Fernando Gomez Pelaez, 325 p., 22 euros) est enfin publié. Le témoignage de ce militant de la Confédération national du travail sur la guerre d'Espagne est essentiel car son auteur, maçon de son état, finira par commander le IVe Corps d'armée avec le grade de lieutenant-colonel. Observateur privilégié et acteur de terrain de l'affrontement militaire avec les troupes nationalistes, de la militarisation des milices, des coups bas et sabotages communistes, il porte une appréciation lucide sur les événements et contredit nombre d'interprétations historiques. C'est aussi une façon de rendre hommage à cet infatigable combattant qui, ayant tout naturellement repris la truelle en 1947, ne rendit pas les armes et apporta son soutien aux Jeunesses libertaires dans leur lutte contre le franquisme au cours des années 1960. Publiée d'abord en fascicules, puis en 1934 en quatre volumes comptant près de 3 000 pages, grâce à la contribution financière du groupe espagnol Los Solidarios (Durruti, Ascaso, Oliver…), L'Encyclopédie anarchiste est le grand œuvre de Sébastien Faure qui a su s'entourer d'une équipe de rédacteurs de toutes sensibilités. Il s'agissait d'« embrasser, dans la mesure du possible, toutes les conceptions et toute la documentation se rapportant au mouvement anarchiste et, par extension, au mouvement social tout entier ». Cet ouvrage était devenu rare, cher (plus de 1 000 euros sur le marché du livre ancien) et difficilement consultable. Les éditions Equateurs ont entrepris sa réédition et le premier volume (lettres A-C, introduction d'Olivier Frébourg, 606 p., 30 euros) vient de paraître, six autres devraient suivre. Magnifique réalisation technique, avec un brochage « dos cousu-collé », du beau papier, et une parfaite lisibilité du texte. Certaines définitions ont certes un peu vieillies (du fait de connaissances scientifiques nouvelles ou de conceptions trop ancrées dans l'esprit du temps), mais l'intérêt historique et celui du retour aux sources en ce qui concerne des notions aujourd'hui frelatées (laïcité) ou des combats quelque peu oubliés (antimilitarisme, internationalisme, contre l'obscurantisme religieux, pour le contrôle ouvrier…) sont incontestables. Et pour ceux qui ne peuvent consentir à cette dépense ou qui souhaitent « goûter le produit », rendez-vous sur un site qui lui est consacré et qui offre la possibilité de butiner les définitions ou de télécharger intégralement l'ouvrage au format pdf. Les Editions du Sextant, quant à elles, ont récemment réédité les souvenirs de Pierre Kropotkine (1842-1921, lire biographie) sous le titre Autour d'une vie. Mémoires d'un révolutionnaire (480 p., 26 euros), avec une présentation de Pierre Sommermeyer. Issu d'une famille de la noblesse russe, Kropotkine a abandonné une carrière militaire toute tracée pour entreprendre des études universitaires. En 1871, il adhère en Suisse à l'Association internationale des travailleurs (AIT) et fait siennes les idées libertaires. De retour en Russie, il se livre à la propagande révolutionnaire, avant d'être arrêté et emprisonné. Evadé, il deviendra l'éditeur des trois principaux journaux de l'anarchisme francophone et le théoricien du communisme libertaire à travers de nombreux ouvrages (lire bibliographie). Plusieurs fois condamné pour délits de presse, il sera régulièrement expulsé et connaîtra de multiples exils… Après la révolution, il regagne la Russie pour assister en spectateur impuissant mais critique à la mise en place de la dictature bolchevique. C'est à une traversée du XIXe siècle que nous invite la lecture de ses Mémoires. La spontanéité a du bon et, parfois, dans la lutte, renverse la situation. Mais il ne faut pas tout attendre d'elle. Quand on analyse les événements sociaux, on trouve bien plus souvent à leur origine un long travail d'éducation, de construction du collectif. La brochure La Force du collectif (Libertalia, coll. A boulets rouges, 56 p., 5 euros), entretien avec Charles Piaget réalisé par le Réseau citoyens résistants, nous en apporte une nouvelle preuve avec l'exemple de Lip. Le conflit dans cette fabrique de montres à Besançon en 1973 fut exemplaire (par ses initiatives, sa pratique autogestionnaire, son sens du collectif et de l'unité, son ouverture sur l'extérieur…) et très médiatisé. Piaget en a été l'un de ses animateurs et nous livre les principes, les outils de cette démocratie de lutte et d'émancipation individuelle. « La pire des choses, c'est quand certains veulent s'imposer. Il faut arriver à être à égalité avec les autres, sinon il n'y a plus qu'à demander aux chefs de se réunir et puis c'est fini ! » Une belle leçon qui semble aujourd'hui reprise par les mouvements d'Indignés. Les quatre fins (pas tant que cela) enquêteurs des services secrets (!) de la FA Ted Chaucre, Pat O'Neil, Denis Saint et Ed Merlieux (si, si, ils existent vraiment) sont de retour pour élucider deux crimes commis rue de Solférino. Meurtres exquis au Parti socialiste (Les Editions libertaires, 86 p., 10 euros), de Jean-Marc Raynaud, a été publié avant les élections législatives. L'auteur s'est trompé de cadavre : dans la « vraie vie », ce n'est pas Olivier Aïoli, secrétaire fédéral du PS de Charente-Maritime, qui est flingué mais Ségolène Impérial, victime d'un parachutage loupé et… du suffrage universel. Après vous avoir dit que le concierge défenestré s'appelait Jean Jaurès, vous aurez compris qu'il s'agit d'une farce – noire – pour lancer quelques jugements bien sentis sur le socialisme réformiste, le PS, la première alternance et les années Mitterrand… On y reconnaît des politicards bien vivants (François Ballande, Manuel Valse, Martine Babry, un certain Merluchon) et quelques militants libertaires, on y croise aussi « Herr Doctor » Marx, le Saint-Père, Georges Marchais, Durruti, Messali Hadj, Raspoutine et bien d'autres dans un joyeux et abracadabrantesque foutoir, illustré par les saisissantes caricatures de Charli (Jean-Charles Vincent). A lire sur la plage, avant la rentrée !

 

RÉUNIONS-DÉBATS

Montreuil, 3 juillet. Discussion avec des camarades de New York autour des formes d'organisation contre la crise économique, à 19 h 30, café-librairie Michèle-Firk, La Maison de l'Arbre - La Parole Errante, 9, rue François-Debergue.

Paris, 6 juillet. Soirée vidéo de la librairie du Monde libertaire, à 19 h 30, avec la projection d'Inventaire avant liquidation (54 min), de Rémy Ricordeau, puis discussion. Expériences de jeunes travailleurs et chômeurs, et recherche d'autres rapports sociaux. Au 145, rue Amelot, Paris 11e.

Paris, 7 juillet. Rencontre à 16 h 30, autour du livre Eloge de la passe (Les Editions libertaires) sur le sport et l'anarchisme, avec Wally Rosell. Librairie du Monde libertaire, 145, rue Amelot (M° République, Oberkampf ou Filles-du-Calvaire).

Paris, 8 juillet. Troisième rencontre des anarchistes étrangers (RAE) dans une optique synthésiste, à partir de 20 heures, au bar-restaurant Maldoror (10, rue du Grand-Prieuré, Paris 11e [M° Oberkampf]).

Paris, 13 juillet. A 20 heures, bal antinational en soutien à Toile libre et Punxrezo au Centre international de culture populaire (CICP), 21 ter, rue Voltaire, Paris 11e (M° Nation ou Alexandre-Dumas). PAF : 5 euros, pas de verre, no dog no master ! Avec Riton la Manivelle, Mana la Manouche et Arnaud le Facteur (chansons populaires et révolutionnaires) ; Heyoka (anarchopunk) ; Medef Inna Babylon (tooloose lo-fighters) ; Broken Arms (irish old school songs and music) ; Les Punaises (à confirmer, girly pop punk). Organisé par le Collectif contre-culture.

Paris, 14 juillet. En soutien à trois syndicalistes en procès après une action à Pôle emploi, la CNT organise une projection du film Disparaissez les ouvriers, de Christine Thépénier et Jean François Priester, puis débat avec Marie-Pierre Aiello. Suivis d'un repas. Prix libres. A 17 heures, 33, rue des Vignoles, Paris 20e (M° Avron ou Buzenval).

Rochefort-en-Terre, 14 juillet. Fête antinationale célébrée par General Strike et Keep the Rage : à partir de 15 heures, projection du documentaire Les Sentiers de l'utopie, suivie d'un débat ; à 18 heures, apéro-concert en extérieur avec Pizza (anarchovariété hip-hop) ; à 20 heures, concert en intérieur avec Heyoka, Spanner, Cop on Fire, Mauvaise Graine… Restauration sur place à prix libre, préparée par la cantine Schmrutz. L'entrée est libre l'après-midi ; concert du soir en intérieur : 8 euros. Ça se passe au Café de la Pente, à Rochefort-en-Terre (Morbihan). Contacts : keeptherage(at)mailoo.org ou generalstrike.asso(at)voila.fr

Toulouse, 19 juillet. Commémoration de la révolution libertaire espagnole du 19 juillet 1936 : à 17 h 30, prise de parole devant la stèle de Francisco Ponsan, militant anarcho-syndicaliste, résistant assassiné par les nazis, dans le jardin Compans-Cafarelli (au centre du jardin, à une cinquantaine de mètres du bd Lascrosses) ; à 18 h 30, au 7, rue Saint-Rémésy, projection-débat « Les luttes sociales en Espagne hier et aujourd'hui : la révolte des mineurs de 1934 à ce jour », point sur la situation. Suivi d'un verre de l'amitié.

Paris, 20 juillet. Ciné-club du SUBTP-CNT, à partir de 18 h 45, dans les locaux de la Confédération nationale du travail (CNT), 33, rue des Vignoles, Paris 20e. Librairie syndicale et buvette (avec plat à prix modique) ; présentation et projection du film La Porte du paradis (1980, 149 min), de Michael Cimino ; puis débat.

Saint-Jean-du-Gard, 21 juillet. A 18 heures, rencontre-discussion sur le soulèvement en Tunisie de 2011 après la projection de deux courts-métrages. La soirée se poursuivra par un succulent repas. Bibliothèque-infokiosque, 152, Grand-Rue.

Marseille, 24 juillet. L'Anarchist Black Cross (ABC) de Marseille et le groupe Germinal accueillent un compagnon d'Action autonome et de l'ABC Moscou pour parler de la situation des anarchistes et des antifascistes en Russie. A partir de 19 heures, au Seul Problème, 46, rue Consolat, Marseille 1er. Courriel : abcmarseille(at)riseup.net

Paris, 27 juillet. Soirée vidéo à la librairie du Monde libertaire, à 19 h 30, avec la projection de La Méthode (115 min, 2005) de Marcelo Piñeyro. La projection sera suivie d'une discussion. Entrée libre. Au 145, rue Amelot, Paris 11e. Site Internet.

Saint-Jean-du-Gard, 30 juillet. Causerie sur les communautés anarchistes, de la fin du XIXe siècle aux années 1930. A 19 heures, bibliothèque-infokiosque, 152, Grand-Rue.

Paris, 3 août. Sylvie (« simple lectrice ») discutera avec vous d'un bouquin qu'elle a lu et aimé : Principes élémentaires de propagande de guerre, d'Anne Morelli. Librairie du Monde libertaire, 145, rue Amelot (M° République, Oberkampf ou Filles-du-Calvaire).

 

FOIRE AUX LIVRES, COLLOQUE,
EXPOSITION, THÉÂTRE…

Eychenat (Ariège). L'Organisation communiste libertaire (OCL) et Offensive libertaire et sociale (OLS) organisent des rencontres ouvertes à toutes et à tous du 26 juillet (accueil) au 6 août. Les débats se tiennent « à la fraîche », à 21 heures, après le repas du soir. Sujets abordés : « Antirépression », « Les soulèvements dans les pays arabes », « La tentation insurrectionniste », « Les résistances sociales aux grands travaux du développement capitaliste », « Le capitalisme vert », « Le publisexisme »… Cela se passe dans une ferme en activité, avec camping et parking. La vie quotidienne est collective et autogérée, et les tarifs journaliers s'échelonnent de 5 à 20 euros selon les revenus. Pour plus de renseignements, s'adresser à : OCL, c/o Egregore, BP 1213, 51058 Reims Cedex (courriel : lechatnoir[at]club-internet.fr) - site Internet ; OLS, c/o Mille Bâbords, 61, rue Consolat, 13001 Marseille (courriel : marseilleols[at]no-log.org) - site Internet. S'inscrire et confirmer au plus tard la veille de l'arrivée.

La Belle Rouge. Pour la septième année consécutive, la compagnie Jolie Môme organise son festival du 27 au 29 juillet à Saint-Amant-Roche-Savine (Puy-de-Dôme). Au programme : du théâtre, du cinéma, de la chanson, des ateliers politiques, des concerts, des rencontres, de la fraternité… Infos pratiques : forfait trois jours (soutien : 90 euros ; normal : 55 euros ; réduit : 39 euros) ; tarif unitaire par spectacle : de 6 à 16 euros. Hébergement : deux campings gratuits, un pour les couche-tôt, l'autre pour les couche-tard. Informations complémentaires.

Conférence internationale de Saint-Imier. Après les exclusions – orchestrées par Karl Marx – de Michel Bakounine et James Guillaume lors du congrès de La Haye de l'Association internationale des travailleurs (AIT), la Fédération jurassienne et des sections d'Espagne, d'Italie, de France, de Belgique et des Etats-Unis organisèrent en 1872 un congrès à Saint-Imier (Jura bernois, Suisse) où les résolutions prises affirmèrent nettement un caractère libertaire. A l'occasion de la commémoration de la naissance de la première internationale antiautoritaire, se tiendra du 9 au 12 août une rencontre internationale entre libertaires qui permettra de dresser le bilan de l'histoire du mouvement anarchiste, de ses idées, réalisations, espoirs, défaites ; de ce qu'il en reste aujourd'hui ; des combats qui sont les siens et de ceux qu'il partage avec d'autres (antimilitarisme, antiracisme, antisexisme, autogestion, décroissance, éducation, féminisme, internationalisme, non-violence…). Un certain nombre d'ateliers et de manifestations sont prévus : conférences historiques ou thématiques, théâtre, concerts, expositions, cinéma, salon du livre, radio, camping libertaire, foire à l'autogestion et aux produits bio, ateliers pratiques, restauration, etc. Programme complet et renseignements pratiques sur le site Internet.

L'anar de la série noire. A la Bibliothèque des littératures policières (Bilipo), se tient jusqu'au 13 octobre une exposition « Meckert-Amila : de la Blanche à la Série noire » pour rendre hommage à Jean Meckert (1910-1995), l'une des figures majeures du roman noir français. Sous le pseudonyme de Jean Amila, il marqua profondément de son empreinte les premières décennies de la collection Série noire avec plus d'une vingtaine de romans (lire notice sur Wikipédia). Cette exposition bénéficie des archives inédites du fils de l'écrivain, Laurent Meckert, et des documents de la bibliothèque. Bilipo, 48-50, rue du Cardinal-Lemoine (M° Cardinal-Lemoine). Du mardi au vendredi, de 14 à 18 heures ; samedi, de 10 à 17 heures (entrée libre).

 

DIVERS

En vrac sur le Web (juillet). Du 14 au 22 mai s'est tenu à Paris, sous juridiction antiterroriste, le procès de six personnes accusées d'association de malfaiteurs « en vue de la préparation d'actes de terrorisme » (lire « En vrac… » de mai) pour des faits remontant à 2006 et 2007. Au cours du procès, les accusés se sont revendiqués du « mouvement contestataire » ou « anticapitaliste » et ont opté pour une défense politique basée sur la contestation de la qualification terroriste et de l'association de malfaiteurs, sur la dénonciation du contexte politique et de l'enquête à charge, et sur le refus de la « preuve » ADN. Si la tentative de créer un épouvantail « anarcho-autonome » a sombré dans le ridicule, il s'est agi pour le pouvoir de durcir encore les lois sécuritaires et d'avertir que la contestation sociale ne devait pas sortir du seul cadre autorisé et défini par l'Etat. Les peines sont conformes au réquisitoire du procureur, ou légèrement allégées, et s'échelonnent de six mois à un an de prison ferme, correspondant pour chacun(e) – à peu de chose près – à la durée des détentions préventives (lire précisions sur Indymedia Paris). Un pur hasard, bien sûr ! Des peines avec sursis, de six mois à deux ans, s'y ajoutent pour maintenir une certaine pression. A noter que le caractère terroriste de l'affaire a été maintenu et que tous les inculpés ont été relaxé du délit de refus de prélèvement ADN. Dossier complet de l'affaire établi par Mauvaises intentions. La police n'arrête pas de déjouer des complots anarchistes… Ce samedi 2 juin, à 18 heures, une demi-douzaine de fourgons de gardes-mobiles et quelques valeureux membres des brigades anticriminalité se sont positionnés devant l'Espace autogéré des Tanneries afin de s'assurer que ne se déroulerait pas un… alleycat nocturne (soit un jeu de piste à vélo). Selon les animateurs du lieu (site Internet), des personnes motivées, après une première réussie il y a quelques mois à Dijon, les avaient sollicités pour que la course ait pour point de départ les Tanneries. Cette « manifestation anarcho-libertaire » (sic) aurait fait frémir le préfet de « zone de défense » de Metz qui, en lien avec le ministère de l'intérieur et en concertation avec la préfecture de Bourgone, a pris un arrêté d'interdiction dans le cadre du plan national de sécurité. Pas moins ! Peuvent pas parler français comme tout le monde ces « cycloterroristes ». Encore heureux que les pandores ne leur ont pas demandé leur ADN car, de façon quasi systématique, ceux-ci effectuent des prélèvements pour nourrir le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Destiné à l'origine, en 1998, à enregistrer quelques deux mille déliquants sexuels, celui-ci conserve actuellement l'« identité génétique » de deux millions de Français (trente mille supplémentaires chaque mois). Il suffit que vous soyez suspecté, ou simple témoin, d'un délit pour en faire partie (informations complémentaires sur Refus ADN). D'où l'intérêt de s'en servir contre des militants politiques, associatifs ou syndicaux lors d'arrestations suite à n'importe quel acte de contestation sociale. Récemment Xavier Renou, poursuivi pour refus de prélèvement, et le Collectif des désobéissants ont posé à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité à propos du fait « que les segments d'ADN prélevés par la police pendant les gardes à vue [permettaient de déterminer la] couleur de peau et [les] éventuelles prédispositions à des maladies génétiques ». De quoi constituer une belle base de données raciales et sanitaires… Le 19 juin, la Cour a rejeté la question et entériné de fait une pratique qui permet des dérives dangereuses. Le Collectif a lancé une pétition pour réclamer l'abrogation de la loi et l'amnestie des « désobéissants ». La librairie Quilombo (23, rue Voltaire, Paris 11e) ferme cet été et la vente par correspondance est interrompue du samedi 28 juillet, à 20 heures, au mardi 21 août à 13 heures (site Internet - courriel : quilombo[at]globenet.org - tél. : 01-43-71-21-07). Pour sa part, la librairie du Monde libertaire reste ouverte (du mardi au vendredi, de 14 heures à 19 h 30 ; le samedi, de 10 heures à 19 h 30), au 145, rue Amelot, Paris 11e (site Internet) - courriel : librairie-publico[at]sfr.fr - tél. : 01-48-05-34-08). Cessation d'activité, définitive cette fois, de la Bibliothèque La Rue (10, rue Robert-Planquette, Paris 18e ; site Internet ; courriel : Paris.bibliothequelarue[at]no-log.org) qui a été animée pendant quatorze ans par des membres de la Fédération anarchiste. Il est possible de rendre les livres empruntés jusqu'au mois de décembre : tous les samedis de 15 h 30 à 18 heures jusqu'au 7 juillet, puis les premiers samedis des mois de septembre à décembre, de 15 heures à 17 heures. Des groupes de la région parisienne envisagent de monter un nouveau projet autour de ce lieu emblématique. Nous ne pouvons que les encourager. Que vous partiez ou non en vacances, vous pouvez toujours aller flâner, sinon à la campagne, du moins dans un jardin, un terrain vague ou une friche. Le groupe Pavillon noir (Fédération anarchiste de la Vienne) a mis en ligne un précieux et passionnant vade-mecum sur les « propriétés alimentaires, condimentaires et médicinales des plantes du carré botanique du jardin des plantes de Poitiers ». Apprenez à reconnaître et à utiliser l'armoise, la bourrache, le chardon-marie, le cumin des près, le fenouil, la lavande et bien d'autres. « Ce topo, réalisé dans la volonté d'une réappropriation sociale des savoirs, fait suite à la visite du 30 mai dernier, animée par un membre du groupe. » Ces camarades qui ne manquent ni d'idées ni d'humour ont également concocté un horoscope un peu particulier : « Bélier (en avril, on ne blague plus) : Les maîtres vous tondent, leurs roquets vous mordent. Vous en avez assez d'être un mouton et de reproduire le troupeau. Cessez de ruminer votre colère et montrez les cornes » ; « Gémeaux (en juin, occupe ton usine) : Entre travail à la chaîne et loisirs chez Castorama, vous vous sentez doublé. Le manège enchanté de votre quotidien aliéné vous polluxe la vie. Si vous ne voulez pas finir schizo, retrouvez votre moitié révoltée ! ». Et ainsi de suite. Normand Baillargeon qui, avec Chantal Santerre, a édité la première anthologie des écrits en français de Voltairine de Cleyre (lire bibliographie) lui rend un touchant hommage à l'occasion du centenaire de sa mort, le 20 juin 1912. Dans « Pour saluer Voltairine de Cleyre », paru sur le site de l'hebdomadaire culturel de Montréal Voir, il livre des jugements de contemporains à son sujet et quelques éléments biographiques. En avril de cette année, l'Atelier de création libertaire (ACL) a réédité le livre Semaines agitées (250 p. avec un CD audio, 12 euros), publié initialement par autoédition en mai 2011, qui témoigne du mouvement contre la réforme des retraites à Lyon en octobre 2010. Grâce aux auteurs, on peut retrouver en ligne et en libre disposition articles (lecture chronologique ou thématique), photographies, témoignages audio… Tout ce qu'il faut pour se plonger totalement dans les événements et suivre pas à pas les différents protagonistes. Il est possible aussi de parcourir le livre sur Calameo.com

En juin, nous annoncions que l'exposition « Albert Camus, l'étranger qui nous rassemble », prévue à Aix-en-Provence sous l'égide de l'historien Benjamin Stora, avait été annulée – censurée – par la mairie UMP de la ville. Nous laissions supposer que la présence de nombreux électeurs anciennement Algérie française expliquait cette réserve envers Camus. C'est faux, le site du Nouvel Observateur du 1er août nous apprend que « cette » expo aura bien lieu, à partir du 7 novembre 2013, mais avec Michel Onfray comme commissaire. Son titre provisoire est « Camus : l'homme révolté », et elle proposera « un regard sur les multiples facettes du personnage en élargissant le propos tel qu'il avait été initialement envisagé autour d'une inscription purement historique de sa vie et de son œuvre », selon le communiqué de la communauté du pays d'Aix (CPA). Reste à savoir si l'on craint plus l'« étranger » que le « révolté » et si Onfray rassure plus que Stora… A suivre !

 

PÉRIODIQUES

Le Monde libertaire (n° 1679, 28 juin au 11 juillet, 24 p., 2,50 euros, site) consacre deux articles au sport, l'un dénonce le foot business et en particulier le projet de construction d'un grand stade près de Lyon, l'autre, interview d'un libertaire sportif de haut niveau, présente assez bien la thématique « anarchie, sport et compétition ». Les dirigeants de l'Olympique lyonnais se sont mis en tête de réaliser un chantier pharaonique, très coûteux et peu utile : spéculation, expropriation et spoliation sont au rendez-vous. Comment concilier sport de combat (judo), élitisme et engagement libertaire ? Plaisir de l'effort, rôle éducatif… « le problème n'est pas le sport en lui-même, mais sa récupération par le capitalisme » est-il affirmé. Autre texte particulièrement intéressant, celui d'Agnès Pavlowsky qui évoque « Les camps de la honte », c'est-à-dire la façon dont la France a accueilli les réfugiés républicains espagnols en 1939, lors de la Retirada (« retraite »), en métropole et en Algérie. Impréparation, infamie, aveuglement politique sont les maîtres mots de cet épisode peu glorieux. Retour sur le contexte historique et politique, et sur les conditions d'existence dans ces camps de concentration. A contretemps (n° 43, juillet, 32 p., « pas de prix, juste des frais », site) nous offre une photographie du mouvement libertaire en France datant de 1951 en reproduisant une série d'articles parus dans Combat au mois d'avril de cette année : la Fédération anarchiste, l'anarcho-syndicalisme, les mouvements espagnol et bulgare en exil, la jeunesse libertaire. Plusieurs articles à propos d'ouvrages récents : « Pour un socialisme débarrassé du progressisme », « Le gouvernement circonstanciel de l'anarchie », « Soumissions et résistances au nazisme »… et de nombreuses notes de lecture. « Ecole et handicap », c'est le thème abordé par le dossier de N'autre école (n° 32, printemps, 56 p., 4 euros, site) qui affirme, arguments et expériences à l'appui, que la place des personnes « en situation de handicap » est bien dans la société, donc à l'école. Il a fallu, semble-t-il, et il faudra encore batailler sur ce terrain pour permettre à l'institution et à tous ses acteurs de s'adapter à tous les élèves sans exception, plutôt que de laisser de côté celles et ceux qui diffèrent des normes. Comment accueillir des élèves autistes, comment concevoir une école véritablement « inclusive », comment une classe spécialisée (Ulis) se met en place, comment se faire reconnaître quand on est « handicapé », comment se définissent les acteurs des structures de soin ou de travail ?… A travers des récits et des parcours, on constate que la question du handicap traverse tout le champ social. Glossaire et encarts juridiques complètent ce dossier. Au sommaire également, un article sur « Simone Weil et la question de l'éducation ouvrière » et plusieurs pages de recensions. Ce numéros est agréablement illustré par les artistes handicapés de Personimages. On peut ne pas partager le sentiment de Jean-Pierre Garnier à propos d'Albert Camus (sa pensée, écrit-il, « à défaut d'être toujours profonde, (…) a le mérite de la clarté »), n'avoir pas tout à fait les mêmes raisons de ne pas apprécier Michel Onfray et son récent ouvrage (cf. « Le dernier nouveau philosophe », dans Le Monde diplomatique de mars 2012), et lire avec intérêt ses trois textes sur « le droit à la ville » et la « démocratie participative » (sic) parus dans la revue des études lefebvriennes La Somme et le Reste (n° 21, mai, 17 p., à télécharger sur le site). De Henri Lefebvre à David Harvey, le concept de « droit à la ville » s'est révélé en pratique être celui des élites dirigeantes ; que faire alors pour le réaliser concrètement alors que les conditions d'existence des classes populaires ne cessent de se détériorer ? Quel rôle joue le territoire dans l'expression physique de l'égalité – ou plutôt de l'inégalité – des conditions sociales ? Depuis des décennies, on évoque la participation des habitants à la politique urbaine. Cela ne sert en définitive qu'à faire accepter des remodelages décidés en haut lieu car il ne s'agit pas de « participer » mais d'intervenir et de contrôler. La nouvelle publication du secrétariat international de la Confédération nationale du travail (CNT), Terre & Liberté (n° 2, mai, 2 euros, site), s'inscrit « au service de la lutte des classes sans frontières, elle veut prendre le temps d'expliquer des situations qui nous sont éloignées, prendre le temps de la réfexion pour sortir du rythme ultrarapide de l'actualité ». Ce second numéro consacre son dossier central aux soulèvements populaires qui ont traversé le Maghreb et le Proche-Orient depuis fin 2010. On y trouve également des articles sur l'Afrique du Sud, le Japon, les Indignés… La Bafouille rebelle (n° 3, mai-juin, 4 p., à télécharger [934 Ko], site), newletters de la fédération CNT des activités postales, du courrier et des télécommunications, quant à elle, met à mal le « mythe de la gestion humaine de la Poste qui serait différente de celle de France Télécom » et dénonce le pseudo « dialogue sur la vie au travail », notant également que la dégradation de la qualité de service est directement imputable aux politiques de réorganisation de la direction. Offensive (n° 34, juin, 52 p., 4 euros, site) consacre son dossier à « L'info en lutte(s) ». Constatant que nous vivons dans une société médiatique où l'information est généralement utilisée comme moyen d'assurer la soumission à l'ordre social, la revue se demande comment investir ce terrain d'action. « En politisant nos pratiques et nos réflexions, en défendant une information émancipatrice et autonome, un large champ d'expérimentation s'offre à nous. Car l'information et un enjeu de lutte et un enjeu au sein des luttes. » La solution consiste-t-elle à « rejeter les postures d'expert-e-s et de spécialistes, casser le rapport vertical du savoir descendant, défendre le “faire avec” en lieu et place du “faire à la place de”, agir depuis l'“intérieur” des luttes, sur le terrain et au contact, pour accompagner, (s')encourager et (se) donner de la force » ? Présentation et analyse de différentes « expérimentations » : média dans la lutte ; journal alternatif local ; Offensive, un espace de réflexion différent ; l'enquête ouvrière ; une écriture collective ; la vidéo légère et… féministe ; Indymedia ; une expérience de vidéo-activisme (Primitivi)…

 

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