Février 2012

PUBLICATIONS

Mais pourquoi donc s'intéresser à François Noël Babeuf, connu pour sa « conjuration des Egaux » et comme précurseur du communisme, plutôt dans sa version étatique ? Ce n'est que dans les dernières pages de Gracchus Babeuf (1760-1797), biographie non autorisée (Editions libertaires, 247 p., 15 euros) que Thierry Guilabert nous l'avoue : c'est d'abord l'homme qui l'intéresse. Et il nous fait de lui un portrait tout en finesse et en contradictions. Cet homme du peuple, un des rares de la Révolution française, né dans la misère, travaille comme terrassier à 12 ans, puis entre comme apprenti chez un notaire et s'établit en tant que géomètre et feudiste (sorte de spécialiste des droits féodaux). Mais rien ne lui réussit. Pourquoi ? Trop fier, trop présomptieux, trop candide, trop revendicatif, pas assez de relations… Il se mettra en tête de défendre le peuple, de lui rendre sa dignité, de prôner l'égalité (économique, et entre hommes et femmes), d'abolir la propriété, que les représentants du peuple rendent compte de leur mandat. Un rêve dans cette France où la bourgeoisie a déjà pris le dessus. Cet homme traversera la Révolution en loupant tous les rendez-vous de l'histoire et échouera dans une piètre conspiration visant à prendre le pouvoir, à rétablir la Terreur, pour imposer ses idées égalitaristes. Ce ne sera pas le dernier à se fourvoyer ainsi. L'auteur réussit cependant à nous le rendre attachant, à démonter ses mécanismes psychologiques, à nous brosser indirectement une vision de la Révolution française réaliste… et combien proche de nous. Après A vos ordres ? Jamais plus ! et L'Intelligence du barbare, Maurice Rajsfus nous offre avec France d'en haut, France d'en bas (Monde libertaire, coll. Pages libres, 256 p., 12 euros) le troisième et dernier volet de sa réflexion sur la domination sociale et sur un système qui génère aliénation, inégalités et individualisme. En haut, les dominants, encouragés et « sacralisés » par des outils de contrôle que sont la télévision et les médias de masse, méprisent, exploitent et écrasent ceux d'en bas. Dans cette « douce France » le respect de la hiérarchie et des pouvoirs est profondément ancré dans les mentalités, et les rapports entre gagnants et perdants sont complexes. Alors quand est-ce que cela va changer ? « Les dominés seront-ils toujours soumis ? », s'interroge l'auteur dès le sous-titre. Des livres parfois se rencontrent, se lancent des cris et se répondent, c'est le cas de Paroles de résistances (recueillies et présentées par Michel Piquemal, Albin Michel, coll. Paroles, 64 p., 10 euros) et de Paroles de murs athéniens (Les Editions libertaires, coll. Paroles, n.p. [62], 13 euros). Si proches et malgré tout différents, le visage buté de Rimbaud face à cette jeune femme voilée, non par la religion mais pour la lutte. Le premier nous présente des photographies d'interventions d'Ernest Pignon-Ernest, affiches de personnages en situation, dans la rue, sur des murs lépreux, composant des tableaux éphémères aux multiples déchirures et taches. En regard, des textes qui ex(h)al(t)e la résistance, toutes les résistances, contre le « bruit des bottes » et le « silence des pantoufles ». Magnifique cette image où un ouvrier court, fuyant l'usine (signalée par un panneau de danger), passant devant une représentation d'homme atteint en pleine tête, et le texte de Jacques Sternberg : « Il paraît, l'Histoire du moins le prétend, que l'esclavage a été aboli sur terre… » Un écrit de Platon nous amène tout naturellement au second recueil, moins esthétisant peut-être car donnant directement la parole aux murs. Les photographies de Yannis Youlountas (voir vidéos sur le site de l'éditeur) nous avertissent que si la Grèce est notre passé, elle est aussi notre avenir. Ce qui s'y passe « est la répétition générale d'un spectacle tragique porté à s'étendre partout en Europe ». Aux peintures murales et aux graffitis sont associés des citations, des proverbes ou de courts textes pour relancer la réflexion et relier les événements (« Barcelona 1936, Athenas 2012 »). Avec des slogans dignes de ceux de Mai 68 : « Le système de l'enseignement est l'enseignement du système » ou « Quand les jeunes sont assassinés, les vieux ne doivent pas dormir », saluant la mort d'Alexis, 15 ans, tué par un policier le 6 décembre 2008. Les éditions Mille et une nuits (Fayard) ont eu la bonne idée de se lancer dans la réédition des ouvrages du pédagogue libertaire suisse Henri Roorda (1870-1925), pratiquement introuvables (bibliographie). Après Le Rire et les rieurs (suivi de « Mon suicide », La petite collection, 112 p., 3,50 euros) et Le Roseau pensotant. Humour de tous les jours (160 p., 4,50 euros), c'est au tour du Pédagogue n'aime pas les enfants (160 p., 4,50 euros). On sait finalement assez peu de chose sur ce professeur de mathématique adepte d'une pédagogie antiautoritaire, proche de l'Ecole moderne de Francisco Ferrer, qui philosophe de façon légère et humoristique sur des sujets parfois graves, cultivant son « pessimisme joyeux », jetant un regard lucide et désabusé sur toute chose. Lorsqu'il s'attaque aux théories du rire, généralement bien ennuyeuses, c'est de façon claire et ludique, constatant entre autres que les « canibales ont des plaisanteries qu'un missionnaire, par exemple, ne goûtera pas du tout ». Il « pensote » humblement sur « nos oreilles (qui) n'ont pas de paupières » (hélas !), sur les amis, la règle de trois, le parapluie, les prénoms, le chien… c'est toujours drôle et fort juste, quelque fois hérétique. S'élevant contre les tares du système éducatif et critiquant les professeurs qui jouissent « d'une trop grande sécurité intellectuelle », il livre les grandes orientations d'une pédagogie « où l'enfant pourra s'épanouir ». Il faisait ainsi sien ce constat d'Elisée Reclus : « Si l'enfant n'a pas l'enthousiasme de l'étude, c'est que le professeur n'a pas l'enthousiasme de l'éducation. » Une seule fois, il paraît se prendre au sérieux avec Mon suicide, bilan amer où il note son espoir de justice sociale, ses regrets, ses sentiments sur les « bons citoyens », sur l'individu et la société, l'amour libre, son métier, la vie, la peur de se rater… « J'ai tout usé en moi et autour de moi ; et cela est irréparable », écrit-il avant de se loger une balle dans le cœur. D'un témoin des travers de ses contemporains passons à un observateur des communautés premières amérindiennes, l'anthropologue et ethnologue Pierre Clastres (1934-1977) qui, contrairement à l'idée alors couramment admise que les sociétés « primitives » n'ont pas encore découvert le pouvoir et l'Etat, développa la thèse qu'elle étaient en fait construites pour éviter que l'Etat n'apparaisse. Elles refusent en fait la différenciation économique et politique en interdisant le surplus matériel et l'inégalité sociale. L'apparition de l'Etat – et son existence – n'étant plus conçu comme une réalité indépassable ; ce qui apportait de l'eau au moulin des anarchistes. Cet ouvrage, Pierre Clastres (Sens & Tonka, 357 p., 32,50 euros), conçu sous la direction de Miguel Abensour et d'Anne Kupiec, lui rend hommage avec de nombreux inédits, des photographies, des extraits de sa correspondance et diverses contributions analysant son apport. Un beau livre, un peu cher toutefois. Ressouvenances, spécialiste de la publication en fac-similé, a réédité l'ouvrage que Thierry Maricourt avait consacré en 1992 à Henry Poulaille (275 p., 20 euros). Celui-ci (1896-1980, lire biographie), autodidacte et anarchiste, est l'auteur de nombreux romans-témoignages – à (re)découvrir d'urgence, bibliographie –, d'essais et d'ouvrages de référence sur la littérature populaire (contes, chansons d'amour, noëls anciens…). Il fut également le créateur et l'animateur du courant de la littérature prolétarienne (article sur Wikipédia) qui devait réunir des écrivains d'origine ouvrière ou paysanne témoignant de leurs conditions de vie et de leur appartenance à une classe sociale. Le biographe retrace agréablement, malgré quelques imprécisions, la vie, le caractère, les amitiés, les combats et l'œuvre de cet « en-dehors de la littérature ». On pourra compléter cette lecture par le numéro très illustré que la revue Itinéraire a fait paraître en 1994 sur la même personne (toujours disponible dans les bonnes librairies). Témoigner, c'est aussi le souhait de Mohammed Taoufik qui, dans Une vie sous le terrorisme (Association pour l'art et l'expression libres [AAEL], 96 p., 8 euros), rend compte à travers le regard d'une jeune femme, Amel, des blessures non cicatrisées du peuple algérien. Plus de deux mille femmes, violées par le GIA, la branche armée du Front islamique du salut (FIS), pendant la décennie noire, survivent à leurs souffrances. Elles n'ont jamais été reconnues comme des victimes du terrorisme, alors que les émirs de ces groupes jouissent de leur liberté et que les responsables de la situation – l'autre face de la terreur – sont au pouvoir.

La sortie de L'Ordre libertaire. La vie philosophique d'Albert Camus (Flammarion, 595 p., 22,50 euros) de Michel Onfray s'est rapidement accompagnée de recensions dithyrambiques de la part de revues peu habituées à saluer une quelconque pensée libertaire (L'Express, Le Figaro et surtout Le Point). Cet éloge du vice à la vertu avait de quoi inquiéter, surtout qu'il s'accompagnait d'une croisade anti-Sartre qui puait la haine recuite et la « guerre froide ». Que Sartre et sa coterie se soient acharnés sur le philosophe, l'écrivain et l'homme n'étonnera personne et surtout pas les anarchistes. Mais ceux qui semblent découvrir aujourd'hui l'originalité et les sympathies d'Albert Camus sont les mêmes qui ont superbement ignoré les écrits rassemblés et présentés par Lou Marin dans Albert Camus et les libertaires (1948-1960) (Egrégores, 2008), les Rencontres méditerranéennes tenues les 10 et 11 octobre 2008 au château de Lourmarin sur le même thème (info sur Anarlivres) et les actes de ce colloque parus en 2009 (renseignements bibliographiques), sans compter les nombreux livres publiés auparavant. Les éditions Flammarion n'ayant pas donné suite à ma demande de service de presse et peu soucieux, pour ma part, d'apporter ma contribution au quatrième groupe d'édition français, j'ai lu avec empressement l'article « Onfray contre les libertaires » de Lou Marin dans Le Monde libertaire n° 1658. Outre quelques erreurs factuels, l'auteur y dénonce l'oubli de nombreux militants anarchistes, amis contemporains de Camus, et le peu d'intérêt – la dépréciation ou le mépris – accordé aux travaux antérieurs des libertaires sur le sujet. Il lui reproche également de réduire le rôle de Rirette Maîtrejan et d'omettre totalement celui de Simone Weil dans l'évolution de l'écrivain (deux femmes ! le prétendu machisme de l'auteur de L'Homme révolté en prend un coup). Ecrire que l'adhésion de Camus à une pensée libertaire cohérente date des années 1930 et non des années 1950, alors qu'il adhère de 1935 à 1937 au Parti communiste en pleine période des procès de Moscou, est une belle ânerie. Pareillement de l'affirmation que, durant la polémique avec Sartre-Jeanson, il s'est retrouvé seul, privé de tout soutien alors que la presque totalité du mouvement libertaire a pris fait et cause pour lui. N'est-ce pas volonté de minorer les autres pour se rehausser soi-même ? Si l'hédonisme et le nietzschéisme peuvent servir à façonner un néolibéral, cela ne suffit pas à faire un anarchiste, il manque l'intérêt pour le collectif, la volonté d'égalité et de changer le monde. Camus-Onfray… L'un s'engageait dans l'action sincèrement, modestement, fermement ; l'autre est suffisant, professoral (voir sa prestation sur un plateau de télé avec Philippe Poutou), peu solidaire (sa réaction dans Siné Hebdo aux arrestations de Tarnac est pitoyable, lire le texte « Pourquoi Onfray-t-il mieux de se taire » de Claude Guillon) et ses choix… électoraux (!) erratiques (lire, par exemple, cet article d'Alternative libertaire de… 2007). Même si nombre de ses écrits et son athéisme affirmé peuvent nous séduire, son aura médiatique nous flatter par ricochet, Michel Onfray doit encore beaucoup évoluer pour espérer devenir anarchiste.

 

RÉUNIONS-DÉBATS

Paris, 3 février. Soirée lecture de la librairie du Monde libertaire à partir de 19 h 30, à propos de La Communauté (2 tomes, Futuropolis), BD autobiographique de Yann Benoît et Hervé Tanquerelle. Yann (« simple lecteur ») et quelques autres viendront discuter avec vous de ce bouquin qu'ils ont lu et aimé. Au 145, rue Amelot, 75011 Paris.

Paris, 4 février. Toujours à la librairie du Monde libertaire, mais à 16 h 30, forum-débat avec Evelyn Mesquida pour son livre La Nueve, 24 août 1944. Ces républicains espagnols qui ont libéré Paris (Le Cherche Midi), en présence du traducteur : Serge Utgé-Royo. 145, rue Amelot, 75011 Paris (M° République, Oberkampf, Filles-du-Calvaire). Site Internet.

Bagnolet, 5 février. A 18 heures, projection d'Invasion à Los Angeles (1988, 93 min), de John Carpenter, au Rémouleur, 106, rue Victor-Hugo (M° Robespierre ou Gallieni). Nouveaux horaires d'ouverture du local : le lundi, de 16 h 30 à 19 h 30 ; le mercredi, de 16 h 30 à 19 h 30 ; et le samedi, de 14 heures à 18 heures. Programme complet du mois.

Le Mans, 5 février. Le groupe Lairial organise à 16 heures un café libertaire sur « L'Internationale, 1864-1876 ». Troisième partie : le centralisme autoritaire et le fédéralisme libertaire, antagonistes, s'affrontent… Rappel historique, exposé et débat. Epicerie du Pré, 31, rue du Pré.

Saint-Denis, 5 février. De 15 heures à 17 heures, « Dimanches au musée » avec la Dionyversité. Ce jour, il est question de « Jean Ignace Isidore Gérard, dit Grandville (1803-1847) », conférence-débat de Laurent Bihl, historien et spécialiste de l'image. Rendez-vous au musée d'art et d'histoire de Saint-Denis, 22 bis, rue Gabriel-Péri (M° Porte-de-Paris ou RER D). Entrée libre.

Saint-Jean-en-Royans, 5 février. Le groupe La Rue râle (Fédération anarchiste) vous invite, à 16 heures, à assister à la projection du film Spezzano Albanese. Depuis 1992, des militants libertaires animent une fédération municipale de base, fondée sur des pratiques d'auto-organisation et d'autogestion. Un débat suivra. Maison du Royans, 29, rue Pasteur. Contact : laruerale(at)no-log.org

Les Ulis, 7 février. Conférence-débat à 20 h 30 avec Grégory Chambat, autour de son livre Pédagogie et révolution (Libertalia) à la Maison pour tous des Amonts, avenue de Saintonge.

Saint-Denis, février. Les cours de la Dionyversité ont lieu de 19 heures à 21 heures à la Bourse du travail, 9, rue Génin (métro ligne 13, station Porte-de-Paris). Cycle « 50 ans après, trois faces de la guerre d'Algérie en France » : le 7, « Charonne : un massacre d'Etat », avec Henri Malberg ; le 14, « Le moment OAS, ou les aventuriers de la cause perdue », avec Jean-Paul Gautier ; le 21, « La solidarité anticoloniale », avec Nils Andersson. Site Internet.

Paris, 9 février. Débat avec Marie Grossmann et Roger Lenglet, auteurs de Menace sur nos neurones, Alzheimer, Parkinson et ceux qui en profitent (Actes Sud). A 19 h 30, à la Bibliothèque Vandamme, 80, avenue du Maine (M° Gaîté). Entrée libre et gratuite.

Paris, 9 février. A 18 h 30, « Quel avenir pour notre école ? », rencontre avec Pierre Clément, coauteur de l'ouvrage La Nouvelle Ecole capitaliste (La Découverte). Bibliothèque Sorbier, 17, rue Sorbier (M° Gambetta).

Montpellier, 10 février. A propos de l'épisode de la bande du Matese (1877), de l'enfermement et de l'utilité du combat révolutionnaire, projection de Saint-Michel avait un coq (1973, 90 min) des frères Taviani. A 20 h 30, au Centre Ascaso-Durruti, 6, rue Henri-René.

Marseille, 10 février. Projection du film D'égal à égales (parcours de femmes migrantes et syndicalistes), à 19 h 30, au Polygone étoilé, 1, rue Massabo. Suivie d'un débat, en présence du réalisateur Christophe Cordier, avec le collectif Alternative libertaire Marseille. Ensuite, la discussion se poursuivra en grignotant et en buvant un verre.

Paris, 10 février. Soirée vidéo de la librairie du Monde libertaire, à partir de 19 h 30, avec la projection des Moissons de la révolte (2006, 52 min), de Richard Hamon et Allessandro Stella, sur la lutte des paysans andalous. Au 145, rue Amelot, 75011 Paris. Entrée libre.

Carpentras, 11 février. Conférence-débat à 18 heures avec Claire Auzias : « Peuple d'ici, peuple d'ailleurs, nomades toujours pourchassés, les Tziganes comme témoins ». Espace Fenouil, 114, rue Fenouil. La soirée se conclura par un buffet dînatoire (PAF : 7 euros). Réservation impérative au 04-90-63-47-40 ou au 04-90-63-15-21.

Limoges, 11 février. Conférence-débat à 20 h 30 sur « Boris Vian, déserteur des idées toutes faites », salle Jean-Pierre-Timbaud (derrière la mairie). Introduction par l'Union pacifiste (UP). Organisée par le Cercle Gramsci et La Vache qui... (journal de contre-information du Limousin). Entrée libre.

Marseille, 11 février. A partir de 19 h 30, repas de soutien aux No TAV (trente-neuf opposants à la ligne de TGV Turin-Lyon arrêtés en Italie le 26 janvier), au Seul Problème, 46, rue Consolat, Marseille 13e. Prix libre et vegan. Organisé par l'Anarchist Black Cross. Courriel : abcmarseille(at)riseup.net

Paris, 11 février. La Bibliothèque La Rue organise une série de débats autour (et avec) les éditions Après la lune. A 15 h 30, rencontre avec Jean-Jacques Reboux, auteur et éditeur de romans noirs, fondateur de ces éditions, à propos du métier d'éditeur engagé. Au 10, rue Robert-Planquette (M° Blanche ou Abbesses). Site Internet.

Rennes, 11 février. A 18 heures, projection du documentaire Seguir luchando para seguir existiendo (1 h 20, VO ST), sur les luttes du peuple Mapuche au Chili, en présence de Sergio Zamora, historien spécialiste des luttes mapuches. Organisée par le groupe La Digne Rage (Fédération anarchiste). Au bar Le Papier timbré, 39, rue de Dinan (M° Sainte-Anne).

Toulouse, 13 février. A 19 heures, des membres du collectif Iana Mar présenteront le livre Travailleurs, vos papiers ! (Libertalia) au café-épicerie Le Récantou, 42, rue des Sept-Troubadours (M° Jean-Jaurès ou Marengo SNCF).

Dijon, 15 février. Les Tanneries organisent une soirée sur l'autogestion : à 18 heures, café-lecture à propos d'Autogestion, hier, aujourd'hui, demain (Syllepse), recueil compilé par Lucien Collonges ; à 21 heures, cinéma avec Fils de Lip (2007, 50 min), de Thomas Faverjon. Au 17, boulevard Chicago (bus n° 12, arrêt Chicago). Programme complet du mois et infos sur le site Internet.

Lille, 15 février. Conférence-débat « Le sport à la moulinette de la critique sociale ! », organisée par La Brique autour de l'enquête de son numéro de janvier-février. A 19 h 30, projection de La Solitude du coureur de fond de Tony Richardson (1962, 62 min), puis discussion avec Fabien Lebrun et Ronan David, coauteurs de Footafric (L'Echappée). Au cinéma L'Univers, 16, rue Georges-Danton (M° Porte-de-Valenciennes).

Paris, 15 février. Présentation à 18 h 30 de l'ouvrage de Frédérick Genevée, La Fin du secret, histoire des archives du PCF (Editions de l'Atelier), aux Archives nationales, salon de l'hôtel de Soubise, 60, rue des Francs-Bourgeois, Paris 3e (M° Rambuteau, Hôtel-de-Ville ou Châtelet). En présence de l'auteur, de Claude Pennetier et de Michel Maso. Sur invitation.

Paris, 16 février. Débat à 19 heures avec Yves-Marie Le Bourdonnec, boucher à Asnières, et Fabrice Nicolino, journaliste et auteur de Bidoche (Les liens qui libèrent) : « Faut-il manger les animaux ? ». Bibliothèque François-Villon, 81, bd de la Villette (M° Colonel-Fabien). Entrée libre et gratuite.

Paris, 16 février. « Mourir à Charonne, pourquoi ? », projection du documentaire de Daniel Kupferstein (52 min), puis débat avec le réalisateur et les auteurs de la BD Dans l'ombre de Charonne (Editions du Mauconduit), Désirée et Alain Frappier. A 19 heures, bibliothèque Faidherbe, 18, rue Faidherbe (M° Colonel-Fabien).

Besançon, 17 février. Réunion publique, à 20 heures, organisée par le groupe Proudhon (Fédération anarchiste) sur les alternatives en actes, avec les exemples d'une université populaire et d'une Amap montées par des militants du groupe Poulaille de Saint-Denis. A la librairie L'Autodidacte, 5, rue Marulaz.

Millau, 17 février. Ciné-libertaire avec la projection, un an après Fukushima, de La Bombe de Peter Watkins, organisé par No Pasaran 12. A 20 h 30, à la librairie Plume(s), 16, rue Saint-Martin. Entrée libre. Site Internet.

Paris, 17 février. Soirée vidéo de la librairie du Monde libertaire, à partir de 19 h 30, avec la projection du documentaire Vivre l'utopie (VF), de Juan Gamero, F. Rios, Mariona Roca et Mitzi Kotnik, témoignages de militants libertaires sur l'Espagne 36. Au 145, rue Amelot, Paris 11e. Entrée libre.

Bagnolet, 18 février. Pierre-Jean Cournet, traducteur du livre Guerre à l'Etat (Libertalia), le présentera à 19 heures au Rémouleur, 106, rue Victor-Hugo (M° Robespierre).

Paris, 18 février. Rencontre-débat, à 16 heures, avec Maurice Rajsfus autour de son dernier ouvrage, France d'en haut, France d'en bas : les dominés seront-ils toujours soumis ? (Editions du Monde libertaire). A la librairie du Monde libertaire, 145, rue Amelot. Site Internet.

Rouen, 18 février. Vidéo-débat à 15 heures sur les luttes ouvrières autour du film de Karel Pairemaure Au prix du gaz, à la librairie L'Insoumise, 128, rue Saint-Hilaire (entrée libre).

Merlieux, 23 février. De 18 heures à 21 heures, rencontre-débat avec Thierry Bourcy, auteur du Gendarme scalpé (Gallimard), dernier ouvrage paru de la série contant les aventures de Célestin Louise, flic et soldat de la guerre de 14-18. A la Bibliothèque sociale, 8, rue de Fouquerolles, animée par le groupe Kropotkine de la Fédération anarchiste. Courriel : kropotkine02(at)no-log.org - site Internet.

Bordeaux, 24 février. Projection du film Nisida, grandir en prison et débat sur l'enfermement des mineurs avec des membres du collectif de soutien aux inculpés de Toulouse. A 19 heures, au local de la CNT, 36, rue Sanche-de-Pomiers. Organisés par la CNT santé-social Gironde. Site Internet.

Chelles, 24 février. L'union locale CNT, en partenariat avec le cinéma Le Cosmos, organise une projection des Nouveaux Chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat, suivie d'un débat en présence de Serge Halimi, auteur du livre éponyme. A 20 h 30, au Cosmos, 22, avenue de la Résistance (près de la gare). Tarif d'entrée au cinéma : 7,90 euros.

Paris, 24 février. Soirée vidéo de la librairie du Monde libertaire, à partir de 19 h 30, avec la projection du documentaire Les Lascars du LEP électronique, qui présente les revendications et la mobilisation de lycéens contre la loi Devaquet, à l'hiver 1986. Au 145, rue Amelot, Paris 11e. Entrée libre.

Paris, 25 février. Rencontre-débat, à 16 heures, avec Marie-Claire Calmus autour de ses deux derniers essais : Dures Procédures et Le Symbolisme au quotidien (Rafael de Surtis). A la librairie du Monde libertaire, 145, rue Amelot (M° Oberkampf, Filles-du-Calvaire et République). Site Internet.

Rennes, 25 février. A 18 heures, projection de ¡ Viva Mexico ! (120 min) de Nicolas Defossé, organisée par le groupe La Digne Rage (Fédération anarchiste). A La cour des Miracles, 18, rue Penhoët (M° Sainte-Anne).

Paris, 29 février. La librairie Quilombo organise à 19 h 45 un débat à propos de l'ouvrage Contre les publicités sexistes (L'Echappée), en présence de membres du collectif qui ont participé à la rédaction. Au CICP, 21 ter, rue Voltaire, Paris 11e (M° Rue-des-Boulets ou Nation). Courriel : quilombo(at)globenet.org - site Internet.

 

FOIRE AUX LIVRES, COLLOQUE,
EXPOSITION, THÉÂTRE…

Théâtre. La Compagnie Marie-Ruggeri joue Louise Michel, écrits et cris, spectacle théâtral et musical sur Louise Michel (1830-1905), du 19 janvier au 15 avril (relâches les 26 février ; 4, 8 et 9 mars). Représentations les jeudis, vendredis, samedis à 20 heures, et dimanches à 18 heures. Prix des places : 20 euros (tarif réduit : 15 euros, tarif groupe : 10 euros). Ce spectacle est conçu à partir de la correspondance et de l'autobiographie de la militante anarchiste (adaptation et jeu : Marie Ruggeri ; musique et jeu : Christian Belhomme). Au théâtre Essaïon, 6, rue Pierre-au-Lard, Paris 4e (M° Hôtel-de-Ville ou Rambuteau). La compagnie peut se déplacer pendant cette période dans les régions Nord, Normandie, Bretagne, Pays de Loire, Centre. Et, les 6 et 7 mars, dans le sud-est de la France (représentation le 8 mars à Draguignan). Contact (invitation, groupe et organisation de spectacle) : 06-64-16-37-35 ou compagniemr(at)yahoo.fr

Journées libertaires de Pau. Toute la semaine, du 20 au 25 février : exposition « L'élection dont tu es le héros », couloir des amphithéâtres de lettres, université de Pau et des Pays de l'Adour (UPPA) ; « Femmes tsiganes », exposition photo d'Eric Roset, coauteur avec Claire Auzias de Chœur de femmes tsiganes (Egrégores), au local de la CNT de Pau. Stand librairie du Centre international de recherche sur l'anarchisme (CIRA) de Marseille, couloir des amphithéâtres de lettres, UPPA. Lundi 20 : à 18 h 30, vernissage de l'exposition « L'élection dont tu es le héros » à la faculté de lettres de l'UPPA. Mardi 21 : à 18 heures, projection de films et débat (faculté de lettres). Mercredi 22 : à 18 heures, conférence sur la terrorisation démocratique avec Claude Guillon, auteur de l'ouvrage éponyme (faculté de lettres). Jeudi 23 : à 18 heures, conférence sur la situation des Roms en Europe aujourd'hui avec Claire Auzias (faculté de lettres). Vendredi 24 : à 21 heures, concert de soutien aux journées libertaires avec Prince Ringard (punk efficace), The Balladurians (punk électro), Eddie & les Chats Teignes (hillbilly des côteaux de Gascogne), à la Maison de l'étudiant (MDE), campus de l'UPPA. Samedi 25 : à 14 heures, spectacle de magie et manifestation « La grande illusion démocratique » ; à 16 heures, conférence et débat sur la situation et l'exploitation de la main-d'œuvre étrangère en Espagne, animés par des membres de la CNT d'Almeria (Andalousie), au local de la CNT de Pau, rue Jean-Baptiste Carreau. Site Internet - courriel : journeeslibertairespau(at)gmail.com ou cnt64(a)yahoo.fr

Expo à Lyon. Le Cedrats présente aux archives municipales une exposition intitulée « 50 ans de presse alternative à Lyon et sa région », jusqu'au 25 février 2012. Des petits bulletins des années 1960 à l'information qui circule aujourd'hui sur Internet, l'histoire de la presse alternative lyonnaise est foisonnante, en particulier dans le quartier de la Croix-Rousse. Archives municipales, 1, place des Archives, 69002 Lyon. Tous les jours (le lundi, de 11 heures à 17 heures ; du mardi au vendredi, de 8 h 30 à 17 heures ; le samedi de 13 heures à 18 heures), sauf jours fériés et dimanches. Tél. : 04-78-92-32-50 - courriel : aml(at)mairie-lyon.fr - site Internet.

Salon du livre libertaire de Paris. En 2012, cette sixième édition ouvrira ses portes dès vendredi 11 mai à 14 heures (jusqu'à 21 heures) et se poursuivra samedi 12 mai, de 10 heures à 20 heures, et dimanche 13 mai, de 10 heures à 16 heures. Des compagnons suisses (francophones, alémaniques ou italophones) ont été invités à venir présenter leur production éditoriale. Ce sera aussi l'occasion de découvrir le programme de la Conférence internationale de Saint-Imier qui se tiendra en août 2012 dans le Jura suisse : conférences, ateliers, expositions, salon, concerts, etc. Autre nouveauté, la création d'un espace livres neufs à prix cassés. Plus de vingt heures de débats (répartis sur trois jours) sont prévus : « Idées reçues sur l'anarchisme » ; « L'alternative anarchiste en actes » ; « L'éducation » ; « Faut-il s'indigner ou se révolter ? » ; « Décroissance et partage des richesses » ; « Avenir des médias libres » ; « Réinventer la grève générale »… Radio-Libertaire (89.4 MHz) proposera à ses consœurs de Paris et de province d'animer et de diffuser des émissions en direct depuis le salon (studio prévu à cet effet). Et tout cela se passera à l'espace d'animation des Blancs-Manteaux, 48, rue Vieille-du-Temple, Paris 4e (M° Hôtel-de-Ville ou Saint-Paul). Entrée à prix libre. Bar et restauration légère. Pour contacter l'organisation : Salon du livre libertaire, 145, rue Amelot, 75011 Paris - tél. : 01-48-05-34-08 - courriel : livrelibertaire2012(at)sfr.fr - site Internet.

 

DIVERS

En vrac sur le Web (février). Connaissez-vous Lucy Parsons (1853-1942) ? Non, ce n'est pas que la « femme de »… Albert Parsons, l'une des victimes de la répression qui suivit les événements de Haymarket Square. C'était une militante de première ordre des luttes syndicales et sociales aux Etats-Unis, confrontée très tôt en tant que femme et métisse à une société réactionnaire. Deuxième femme à avoir adhéré aux IWW en 1905, elle milite contre l'exclusion des sans-logis, des pauvres et des chômeurs dans les années 1910, puis se consacre à la lutte contre les discriminations raciales de 1920 à 1930. Un article du Monde libertaire dresse un beau portrait d'elle et deux de ses textes ont été traduits récemment par Jean du groupe Pavillon noir de la Vienne : « Je suis anarchiste », discours qu'elle fit en 1886 pour défendre les inculpés de Chicago et « Aux vagabonds ». Depuis le mois d'octobre, un site de la Bibliothèque nationale de France (BNF), Nouveautés Editeurs, présente (au moins durant trois mois après leur parution) les nouveaux livres – à paraître ou récemment parus – annoncés par les éditeurs dans leur déclarations de dépôt légal et affiche leurs première et quatrième pages de couverture. Les recherches sont possibles par mots (auteur, éditeurs, titre), date de parution, période ou mots-clés… On y trouve ainsi six ouvrages à propos de M. Sarkozy et douze avec le mot « révolution » dans le titre… un signe, peut-être ! Fondé en mai 2011, au Caire, pendant la révolution égyptienne, le Mouvement socialiste libertaire (précisions sur Anarkismo) est, sans surprise, la cible des Frères musulmans (alliés à la junte militaire). Sur plusieurs sites Internet ou pages Facebook, ceux-ci les dénoncent pour incitation à la violence et propagande contre l'Etat (fin décembre, une plainte a été transmise au procureur de la sécurité d'Etat). En Egypte, avant la Première Guerre mondiale et durant une cinquantaine d'années, des anarchistes ont contribué à l'introduction du socialisme dans le pays. Un article d'Anthony Gorman (trad. de Didier Monciaux), paru dans les Cahiers d'histoire, retrace l'action des travailleurs italiens (au début des années 1860), la venue d'Errico Malatesta en 1878 et l'apport d'autres communautés (Juifs et Grecs, essentiellement) au début du XXe siècle. Il détaille également les orientations, la presse et les activités de ce mouvement, ainsi que la création de l'Université populaire libre. Le sport, il y en a qui détestent… surtout à causes de certaines valeurs transmises (sélection, élitisme, compétition) et de son aspect commercial ; c'est le cas du Groupe contre l'horreur olympique et sportive (GrouCHOS) qui récidive à propos du Dakar (compilation d'articles), juge les activités sportives dangereuses et se montre chagrin en parcourant le programme du Front de gauche (lire). D'autres l'apprécient, sous conditions. La Feuille d'infos du CIRA Marseille (n° 135, janvier) nous apprend ainsi que « le football anarchiste existe ! Autonômos et Autonômas FC sont deux équipes, masculine et féminine, créées à São Paulo (Brésil) en 2006, dans le cadre d'un squat autogéré par des punks, des anarchistes et d'autres militants. Parmi leurs principes : l'engagement est aussi important que bien jouer, le jeu est collectif, pas d'arbitre dans la mesure du possible, se faire des amis et non pas des ennemis…  » Ces deux équipes devaient d'ailleurs participer à un tournoi autogéré et alternatif qui s'est tenu en Argentine à la fin du mois de janvier. Et il se dit même que les Editions libertaires préparent un livre collectif sur « sport et anarchisme » (football, escalade, cyclisme, etc.). Quelle horreur ! Des boulangers qui se revendiquent de Pierre Kropotkine, prônent la mise en commun et le refus de l'idéologie autoritaire, « pens[ant] que l'égalité sans la liberté n'est rien », cela existe sur la Toile (« La conquête du pain ») et dans la « vraie vie » à Montreuil, au 47, rue de la Beaune (ouverture du lundi au vendredi, de 11 h 30 à 14 heures et de 16 heures à 20 heures). C'est une boulangerie bio autogérée, ouverte depuis septembre 2010, dont les baguettes se nomment Le Baobab et La Préhistorique, avec quinze sortes de pains (leur composition est indiquée très précisément) et cinq viennoiseries différentes. Comment s'étonner après cela que les sandwichs s'appellent L'Engels, Le Marx, Le Malatesta, Le Bakounine, Le Durruti ou Le Louise Michel ? Et tout cela à des prix raisonnables… A midi, quatre formules sont disponibles : La Commune, version Communard ou Versaillais, et La Révolution russe, option Bochévique ou Tsariste. On peut même commander (courriel : laconquetedupain[at]gmail.com) à l'avance ! Ceux qui sont un peu agacés de voir, grâce aux bons soins de Michel Onfray, l'« ordre libertaire » (!) s'étaler dans les pages des revues (surtout de droite et prônant le néolibéralisme), devraient pour retrouver leur calme et leur sérénité écouter quelques enregistrements (en mp3) restaurés et bichonnés par l'ami Jean-Denis à propos d'Albert Camus : hiver 1951, évocation de L'Homme révolté paru peu avant ; une lecture de L'Etranger en 1954 ; la Conférence de presse, le 9 décembre 1957, et le Discours de Stockholm le lendemain ; au retour, le 22 janvier 1958, suite à une invitation des républicains espagnols, son allocution (reproduite dans Preuves sous le titre « Ce que je dois à l'Espagne »). En prime, un fichier pdf d'articles à son sujet parus dans Le Monde libertaire. Un nouveau site Internet est né. « Issue des réseaux internationaux de solidarité avec la rébellion zapatiste au Chiapas, La voie du jaguar s'ouvre en janvier 2012 en reprenant une large part des documents réunis depuis la fin des années 1990 pour le site d'une assemblée de solidarité de l'Est parisien (CSPCL). Cet espace est créé pour donner suite aux conversations sur le mouvement social dans l'Etat d'Oaxaca (Mexique) entre Georges Lapierre, Rubén Valencia et David Venegas – tous deux partie prenante des Voix d'Oaxaca construisant l'autonomie et la liberté (Vocal). » Il se veut une « passerelle vivante et un lieu de discussion lié aux résistances et aux expériences passées et présentes sur toute la planète, cherchant leur cohérence dans l'autonomie du mouvement d'émancipation sociale ». La révolution libertaire et l'expérience des collectivisations ouvrières et paysannes en Espagne sont une autre de ses sources d'inspiration, tout comme la perspective de l'autogestion généralisée inscrite dans les luttes sociales en Europe à partir de la seconde moitié du XXe siècle.

Adieu l'ami. « Journaliste, critique, chroniqueur, écrivain, Bernard Thomas est mort, jeudi 12 janvier, d'une crise cardiaque, à l'âge de 75 ans, dans le train qui le ramenait de sa Bretagne natale vers Paris », ainsi Le Monde a-t-il annoncé la disparition de celui qui se disait le « dernier des anarchistes » du Canard enchaîné (sur cet « objet politique mal identifié », on lira avec profit l'article de Laurent Martin, paru dans la Revue d'histoire moderne et contemporaire). Né le 25 octobre 1936, Bernard Thomas prit part à la fondation du Magazine littéraire, en 1966, et de L'Idiot international, en 1970, avec Jean-Edern Hallier. Il entra au Canard enchaîné en 1974 et, deux ans plus tard, en devint le responsable de la rubrique culturelle, assumant la critique de théâtre et de télévision. Il participa également de 1990 à 2010 à l'émission « Le Masque et la Plume », sur France Inter. Mais nous nous en souviendrons plus particulièrement pour ses ouvrages sur les anarchistes illégalistes (lire bibliographie) : Alexandre Marius Jacob (biographie), la bande à Bonnot ou, plus récemment, Lucio Urtubia (Lucio l'irréductible, Flammarion, 2000). Même si souvent il se laisse emporter par sa verve et son imagination, comme le rappelle Jean-Marc Delpech sur son blog consacré à l'« honnête cambrioleur ». Il est aussi l'auteur d'un recueil de citations, Ni Dieu, ni maître, les anarchistes (Tchou, 1969, rééd. en 2007), publié à une époque où il était difficile de se procurer la plupart des textes cités. Ce qu'il déplorait dans sa préface et qui était largement démontré par la maigre bibliographie en fin d'ouvrage. En ce domaine, les choses ont bien changé ; pour le reste, le Mur et le « communisme » étatique sont tombés à l'Est, renforçant d'autant plus le libéralisme, aujourd'hui confronté à ses contradictions. Le combat continue…

Jargon libre. Pour ceux qui ont commencé à militer dans les années 1970 (ou plus tôt), ce nom rappelle bien des souvenirs, celui tout d'abord d'une librairie où l'on trouvait toute la presse et les brochures de la galaxie libertaire, autonome et issues de multiples luttes spécifiques ; celui également d'une « personnalité » du mouvement, Hellyette Bess. Fondé en 1974, le Jargon libre a cessé ses activités en 1984, suite à l'arrestation de son animatrice pour ses relations avec Action directe. En 1990, renaissance sous forme d'association, à Avignon, où elle publie Front, revue de prisonniers révolutionnaires emprisonnés. En 1995, la librairie associative commence une vie d'errance à Paris, à Montreuil, puis à Vincennes. Transformée en bibliothèque, elle trouve refuge dans divers lieux avant de s'installer en octobre dernier à Ménilmontant, au 32, rue Henri-Chevreau, Paris 20e (ouverture : du lundi au samedi, de 14 heures à 20 heures). « Bientôt, chacun pourra consulter archives et livres sur le mouvement ouvrier et révolutionnaire, l'anarchie, le marxisme, le surréalisme, le situationnisme, l'éducation, le féminisme, la prison, etc., et les luttes, bien sûr. Il sera possible d'étudier sur place et de photocopier les documents (lorsque nous aurons une photocopieuse !). (…) Nous avons décidé de créer un lieu propice à la consultation de la richesse et de la diversité des expériences du mouvement à travers le temps, en espérant que ce lieu sera aussi celui d'échanges enrichissants et constructifs… et, bien sûr, une oasis de fraternité », confie Hellyette au Monde libertaire (n° 1644, lire). Voir également photographies et article sur Jura libertaire. Des rencontres autour de livres devraient ainsi se tenir régulièrement. Mais le loyer étant de 850 euros par mois et le but non commercial, des difficultés sont à prévoir sans un soutien financier (Association Jargon libre, Société générale, 264, rue des Pyrénées, 75020 Paris - RIB : 30 003 03 434 00 050 740 050 53).

 

PÉRIODIQUES

Face à la réforme de Presstalis (ex-NMPP) (lire l'article de Patricio Salcedo et Ramon Pino, « Presse de mal en pis »), les périodiques libertaires réagissent de façons diverses pour ne pas « boire le bouillon » tout en essayant de conserver une certaine visibilité. Après Courant alternatif qui a arrêté sa diffusion en kiosques en novembre 2011, Alternative libertaire n'est plus vendu de cette façon qu'un mois sur deux (liste des points de vente sur Trouverlapresse.com, abonnement par la boutique en ligne). Pour sa part, Le Monde libertaire a lancé une formule gratuite dont les premiers numéros (téléchargement du n° 1, du n° 2 et du n° 3, les prochains seront disponibles sur le site du journal) ont été diffusés à quelques six mille exemplaires par les différents groupes de l'Hexagone. Il s'agit d'un huit pages, encore quelque peu austère, qui reprend quelques articles de l'hebdo. Cela semble annoncer un arrêt de la diffusion en kiosque, avec un repli sur l'abonnement pour la formule complète et une autre, réduite et gratuite, à distribuer. Dans le n° 1658 (2 au 8 février, 24 p., 2,50 euros), il ne faut surtout pas manquer l'article de Lou Marin à propos du dernier ouvrage de Michel Onfray (voir ci-dessus). Chacun de ces titres appelant bien sûr à s'abonner en soutien. Un autre qui se plaint du coût de la distribution, c'est La Brique (n° 30, janvier-février, 16 p., 2 euros, site), le « journal local d'info et d'enquête de Lille et d'ailleurs », qui lance une souscrition pour poursuivre ses activités : « (…) 65 grammes de critique sociale bien servie, emballée dans seize pages noir et blanc, garanties sans OGM ni Bisphénol A. Livrée à domicile, directement du producteur au consommateur. Alors ce serait dommage de s'en priver. Aujourd'hui, le canard a (vraiment - vraiment) besoin de thunes pour continuer à dealer ses enquêtes cultivées localement par une dizaine d'artisans-journalistes. Concrètement, 3 000 euros ça représente l'impression de deux numéros » (lire la suite). Au sommaire de ce numéro : « Dossier : le sport, cheval de Troie », « Carlton connection : une affaire de classe », « Justice fiction : le procès de La Brique n'a pas eu lieu ? », la presse « alternative » questionnée, une action anticoloniale contre Sephora, un hommage à TEKE et aux peintres de la métropole… Parions que la mairie de Lille et les notables de la région ne feront rien pour sauver la liberté de cette presse-là. En janvier, Courant alternatif (n° 216, 32 p., 3 euros, site) consacre plusieurs pages à la répression de la contestation sociale qui semble s'accentuer et se généraliser, s'inscrivant comme un mode de gouvernementalité « moderne ». Après avoir effectué un constat de la situation, le mensuel livre quelques « exemples d'opérations policières très ciblées », une chronologie du renforcement des lois sécuritaires, une analyse du discours sur la « délinquance des jeunes » et le développement de l'enfermement, et appelle au soutien des personnes inculpées dans le cadre d'une action contre les prisons pour mineurs (Labège). Constat est fait également du recours systématique à l'analyse ADN et de la multiplication des chefs d'inculpation pour un seul délit. L'organe de presse de la Confédération nationale du travail (CNT), Le Combat syndicaliste (n° 364, janvier, 12 p., 2 euros, site), après un arrêt de plusieurs mois, reprend une parution régulière et nous offre un agréable dossier sur l'édition. Celui-ci contient un compte rendu de La Trahison des éditeurs (Thierry Discepolo, Agone), l'interview d'un des fondateurs de Libertalia, celle d'un libraire qui nous fait part de son « travail névrosé », une présentation du collectif Livres de papier « réfractaire à l'ordre numérique », un article sur l'évolution des bibliothèques publiques et un autre sur les risques d'Internet. Ce dossier se poursuivra dans le prochain numéro par un entretien avec un militant du syndicat interprofessionnel de la presse et des médias (SIPM-CNT), graphiste et coloriste de BD, à propos de la conception du livre et de l'évolution de la profession. Avec « André Prudhommeaux, un anarchiste hors les murs », A contretemps (n° 42, février, 67 p., « pas de prix, juste des frais… », site) nous entraîne à la rencontre d'un militant (lire biographie) injustement méconnu, du fait certainement de son extrême discrétion, mais aussi de son intransigeance austère et de son parcours de militant et d'intellectuel difficile à schématiser. Du communisme de conseil à l'anarchisme, et son évolution même au sein des sensibilités de celui-ci, du communisme libertaire à l'« anarchisme pacifique et libéral (dans le meilleur sens du terme) », « il en explore, chaque fois et l'esprit toujours en éveil, les ouvertures, les recoins et les impasses ». Une lucidité certaine, un refus de la facilité et une grande exigence intellectuelle l'amèneront souvent à se situer à contre-courant du milieu libertaire majoritaire : pour la défense de Marinus Van der Lubbe (l'incendiaire du Reichstag), contre l'entrée des ministres anarchistes au gouvernement républicain durant la guerre d'Espagne… On le découvre aussi bon connaisseur de la révolution allemande et du spartakisme, critique littéraire, animateur et contributeur de nombreuses publications (dont Témoins, lire à ce propos « Albert Camus et la revue Témoins »), son rôle au sein de la Commission de relations internationales anarchistes (CRIA). Ce numéro exceptionnel par la taille et la qualité contient également plusieurs textes de Prudhommeaux. Nous terminerons ce modeste tour d'horizon avec un webmagazine, Divergences, qui, sous la plume de Charles Reeve, nous explique en quoi le mouvement Occupy aux Etats-Unis est porteur d'espoir. Sa volonté d'auto-organisation, de mettre sur pied des œuvres collectives et sociales (au pays de l'« individualisme marchand »), son refus des partis, sa « recherche obstinée de nouvelles façons d'affronter le système », d'agir avec créativité et humour, son souhait de rencontrer et de lutter avec des secteurs ouvriers combatifs (au grand dam des bureaucraties syndicales), de « nouer des liens concrets avec les plus exploités » ne peuvent que nous séduire. Si la répression et l'expulsion des places et des rues conduit le mouvement à se replier momentanément et à passer à une autre étape, l'occupation d'immeubles, il ne fait aucun doute pour l'auteur que ce n'est qu'un début… Par ailleurs, plusieurs articles de Jean-Pierre Garnier s'appliquent à dénoncer le « radicalisme chic » de quelques gourous développant une pensée anticapitaliste universitaire bien éloignée des luttes et des résistances sociales. Avec des rubriques « international » et « culture » toujours aussi riches et diversifiées, on ne peut qu'être tenté de rebondir d'un texte à l'autre.

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